La réaction au commentaire de Pedrito sur l'Huma rèvèle que notre culture , du moins pour les plus anciens , reste marquée par un besoin d'unanimité. Être contredit est ressenti comme une agression ou une leçon donnée.. Mais nous vivons une période très particulière , comparable aux années 1788, un monde s'effondre et rien encore ne le remplace. Rien ne serait donc plus dangereux qu'un monolithisme de la pensée, puisque nous avons à affronter une tâche que personne n'a affrontée avant nous, dépasser le capitalisme dans la démocratie.
Les communistes au sens large ont un socle commun, qui les différencie des autres familles politiques : la lutte des classes est intégrée, la valeur du travail aussi. Nous sommes pétris de marxisme. Mais le marxisme n'a pas réponse à tout. Sur ce qu'il y a après la mort, sur notre présence minoritaire dans des municipalités socialistes ou vertes , sur les questions environnementales, sur ce que doit être le contenu journalier de l'huma, sur la politique extérieure concernant des pays qui n'ont rien de marxiste, sur l'existence même d'une étape socialiste, une unanimité n'est ni possible ni souhaitable entre communistes. Car on peut toujours se tromper dans ses analyses et chacun et chacune de nous a une histoire.
Il importe donc de construire un intellectuel collectif au sens de Gramsci. Ce n'est possible que dans le débat. La vie de notre blog prouve tous les jours la difficulté d'y arriver. Quelques autres et moi- même émettons des idées , avec très peu de retours positifs ou critiques. Il est probable que le blog est ressenti comme l'expression du PCF, ce qu'il n'est pas . Il est l'expression d'une section un peu élargie , et dans cette section de quelques personnes qui discutent certes avec d'autres et qui dans un environnement obscur cherchent des solutions, s'aidant de sources déterminées.
La fonction informative du blog est irremplaçable. Tout le monde n'a pas le loisir ou les connaissances linguistiques permettant de parcourir internet. Mais sa fonction débat est largement en devenir.
Ce que l'Humanité, le journal, appelle débat , l'expression d'avis qui cohabitent sans dialoguer et sans aboutir à quoi que ce soit , n'est pas notre choix . Nous appelons débat à notre niveau un sujet, par exemple la reconquête des quartiers populaires , dépassant le constat et sur lequel chacun propose des solutions avant d'aboutir à une synthèse (ou pas) et de passer à autre chose.
Tant que nos succès et notre activité sont minimes ce débat a du mal à s'instaurer. L'intellectuel collectif, nous dit Gramsci, ne s'empare des problèmes que quand ils se posent.
Pour prendre l'exemple précédent, si notre implantation à la Paillade devient une réalité, nul doute que les difficultés , les contradictions et les succès feront travailler les têtes. Tant que cela n'existe pas la question ne se pose pas.
C'est l'originalité du communisme : joindre la théorie et la pratique. D'où la difficulté.
Henri Ausseil